Distinguer des niveaux de perception

Percevoir la présence de nutriments, percevoir la chaleur, percevoir les sons ou les vibrations, voir... : par définition, les êtres vivants peuvent percevoir leur environnement, par exemple au travers de récepteurs membranaires, par les organes spécialisés sous-tendant leurs sens ou au travers d’instruments d’observation souvent destinés à étendre leurs sens. Or, percevoir, c’est à la fois capter des signaux et les interpréter, c’est-à-dire leur donner du sens, que ce sens soit pertinent ou non. En latin, ‘percĭpĕre’ signifie entre autres saisir au travers de ses sens (c’est-à-dire voir, entendre ou sentir) ou saisir par son intelligence (c’est-à-dire appréhender, comprendre, savoir, voire concevoir).

Ceci étant, même doté de sens augmentés, chacun ne peut observer que certains pans de son environnement, si bien qu’il nous faut faire une première distinction entre les constituants réels d’un être vivant et de son environnement, c’est-à-dire les « choses en elles-mêmes », et les observations que l’être vivant peut en faire, c’est-à-dire les phénomènes qu’ils lui sont accessibles.

À titre d’exemple, une même réalité, telle que le Soleil, peut être ressentie par la chaleur qu’elle crée, par sa luminosité ou par les seuls effets de son rayonnement UV ; le Soleil peut être observé sans filtres ou au travers de filtres, dans l’ultraviolet proche ou dans l’ultraviolet lointain, ou bien grâce à un coronographe ; d’autres pourraient ressentir ou observer sa magnétosphère, souffrir des effets de son vent solaire, capter ses neutrinos ou être sensibles à son champ gravitationnel ; dans le visible, un être humain verra différemment le Soleil depuis la Lune qu’au travers de l’atmosphère terrestre ; sur Terre, il le verra différemment en journée qu’au coucher. À ce titre, toute observation est partielle au sens où elle ne capte qu’une part de la réalité.

Les observations peuvent être suivies d’interprétations, lesquelles sont des représentations de la réalité ou du moins des tentatives, par un être vivant, de rendre compréhensibles tout ou partie de ses observations. Cependant, les interprétations dépendent à la fois des observations à la disposition de l’être vivant et de son processus d’interprétation, de telle sorte qu’une même réalité peut faire l’objet d’interprétations d’une grande variété : voir le Soleil comme une boule de feu ; se le représenter avec ou sans rayons ; n’y voir qu’une source de chaleur ou de lumière ; l’incorporer dans un système géocentrique ou dans un système héliocentrique ; en faire une ou plusieurs divinités (Râ, Hélios, Apollon, Sól...) ; y voir une étoile de type naine jaune parmi bien d’autres ; l’interpréter en tant que système en équilibre hydrostatique modélisable par diverses équations, et notamment par des équations décrivant les réactions de nucléosynthèse qui se produisent en son sein...

Enfin, les interprétations choisies permettent d’envisager ou de se former l’idée de certains possibles, dont un ou plusieurs se réaliseront, à la suite d’ultimes choix. S’agissant du Soleil, certains choisiront de faire des offrandes au Dieu Soleil ; d’autres préféreront se laisser dorer au soleil, éventuellement en se protégeant des risques d’insolation ou des effets des UVA ou des UVB ; d’autres encore chercheront à imiter le Soleil, en créant des sources de lumière artificielle (à l’image des lampes à incandescence, des lampes halogènes, des tubes fluorescents ou des diodes électroluminescentes), voire en reproduisant des réactions de fusion nucléaire dans des environnements confinés (à l’image du tokamak ITER ou du stellarator Wendelstein 7-X), jusqu’à disposer d’une technologie supplémentaire de production d’énergie. Certains choisiront plutôt d’exploiter le rayonnement solaire, par des installations photovoltaïques, par des centrales solaires thermodynamiques à concentration ou en tirant parti de processus de photosynthèse.

C’est pourquoi il est proposé de distinguer au moins trois niveaux de perception de la réalité ou des choses en elles-mêmes, c’est-à-dire de ce qui est : (a) les observations, c’est-à-dire ce que l’être vivant considéré peut observer de la réalité, par ses sens ou en améliorant ses sens (par exemple par des instruments d’observation) ; (b) ses interprétations de la réalité, lesquelles s’appuient plus ou moins sur ses observations ; (c) les possibles à l’état d’idées qui en émergent et qui peuvent s’appliquer à la réalité comme à l’un ou l’autre des trois niveaux de perception de la réalité.

En effet, en se réalisant ou en étant réalisés, c’est-à-dire en passant de l’état d’idées à l’état de possibles réalisés, les possibles anciennement à l’état d’idées modifient la réalité ou du moins l’être vivant et son environnement immédiat (se mouvoir, mouvoir quelque chose, se laisser porter, absorber ou rejeter quelque chose, etc.) ; en outre, en modifiant la réalité interne ou externe, ils peuvent modifier les observations de l’être vivant (prêter attention aux signaux d’autres sens, ouvrir les yeux, attendre le jour, choisir de palper ce qu’on ne peut voir, choisir d’ignorer ou de tenir à distance ses sensations...), ses interprétations (examiner d’autres interprétations, adopter l’interprétation d’autrui…), voire ses possibles à l’état d’idées (choisir de générer et d’examiner d’autres idées de possibles, prendre en compte des idées de possibles créées par d’autres...).

Par ailleurs, l’être vivant choisit des observations, des interprétations et des possibles à l’état d’idées. Il ne tient pas nécessairement compte de toutes les observations qui lui sont accessibles (par exemple par souci de simplifier la réalité, par inattention ou par prédilection pour les observations en provenance de certains sens) ; il écarte des interprétations (par exemple en fonction de leur plausibilité) ; il retient certaines idées de possibles au détriment d’autres (par exemple en estimant leur efficacité, leur effectivité ou leur efficience). De plus, il choisit pour partie au moins sa réalité interne (par exemple en assimilant des ressources ou en rejetant des déchets, en croissant ou en muant) et sa réalité externe (par exemple en se déplaçant pour accéder à un autre milieu de vie, en modifiant son milieu de vie ou en ne germant que lorsque certaines conditions sont réunies). De ce fait, il est permis de subdiviser la réalité et les trois niveaux de perception de la réalité en deux sous-ensembles chacun : les réalités et les réalités choisies ; les observations et les observations choisies ; les interprétations et les interprétations choisies ; les idées de possibles et les idées de possibles choisies.

Référence
PL 110
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9,25 heures

Tracé de plusieurs représentations possibles des niveaux de perception ou de compréhension, en particulier pour y faire figurer les liens entre niveaux (passage des idées d’actions aux actions retenues par des décisions, puis mise en application des actions produisant des effets sur chacun des niveaux de perception), description des niveaux et de leurs liens avec la définition d’un être vivant (capacité à percevoir), réorganisation des ébauches (déplacements et regroupements de paragraphes) ; travaux principalement réalisés les 03/02/2019, 29/07/2019, 30/07/2019, 24/08/2019, 31/08/2019 et 01/09/2019

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2,75 heures

Mise en ligne d’une première description textuelle de quatre niveaux de perception (réalités, observations, interprétations et propositions de transitions) ; relectures et réécritures ; transformation progressive des actions et des idées d’actions en idées de transitions, de façon à tenir compte des transitions passives ; transformation ultérieure en propositions de transitions puis en possibles (changements de l’intitulé du 4ème niveau) ; ajout d’un résumé

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3,50 heures

Passage de quatre à trois niveaux de perception, désormais désignés par les lettres a, b et c, puisque la réalité n’est pas un niveau de perception de la réalité (la réalité est le substrat perçu au travers d’observations, d’interprétations et de possibles à l’état d’idées) ; reformulation visant à préciser que les observations peuvent concerner à la fois la réalité interne (être vivant) et la réalité externe (environnement ou milieu de vie) ; autre reformulation visant à préciser que, par leur réalisation, les idées de possibles modifient indirectement et non directement les trois niveaux de perception ; ajout de la subdivision entre réalités et réalités choisies, ainsi qu’entre perceptions et perceptions choisies ; choix d’utiliser le terme de ‘choix’ plutôt que celui de ‘sélection’ ou de ‘décision’ ; en complément, réflexions sur une typologie des transitions et mise en cohérence de la définition d’un possible pour y tenir compte des transitions réalités>réalités choisies et perceptions>perceptions choisies, ainsi que pour y introduire des exemples de transitions possibles sous la forme de verbes